Qu’est-ce qu’un faux souvenir ?
15/6/2025

Qu’est-ce qu’un faux souvenir ?

Lorsque j’ai reçu Anna, 34 ans, elle venait consulter pour des crises d’angoisse inexpliquées. En hypnose, une image lui est revenue : une scène floue, dérangeante, où elle aurait été victime d’un abus dans son enfance. Elle en était bouleversée, persuadée d’avoir retrouvé « la vérité ». Mais en poursuivant le travail, nous avons découvert que cette scène, bien que douloureuse, ne correspondait à aucun événement objectivement vérifiable. Fallait-il la croire ? Devais-je la détromper ? Ou simplement écouter ce que ce souvenir voulait dire, même s’il n’avait jamais existé ?

Table des matières

En bref...

Les faux souvenirs ne sont pas des affabulations. Ils sont le langage de l’inconscient, la tentative du psychisme de donner une forme à ce qui échappe à la mémoire consciente. En psychanalyse comme en psychothérapie, ils doivent être traités avec respect, prudence et sens clinique, car leur rôle symbolique est souvent bien plus important que leur véracité historique.
Entre vérité et imaginaire, ils tissent le roman intérieur du sujet.
Bonne lecture. 😉

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Quelques chiffres clés sur les faux souvenirs

🧠 1 adulte sur 4 peut créer un faux souvenir sous suggestion douce

Selon les recherches d’Elizabeth Loftus (Université de Californie, Irvine), environ 25 % des participants à ses études se souviennent d’un événement fictif suggéré comme s’il était réel (ex. : s’être perdu enfant dans un centre commercial).
👉 Source : Loftus, E. (1997). Creating False Memories. Scientific American.

🧠 30 à 40 % des souvenirs d’enfance peuvent être partiellement inexacts

D’après une étude de l’Université de Genève, la mémoire autobiographique est inexacte dans 36 % des cas en moyenne sur les souvenirs remontant à l’enfance.
👉 Source : Université de Genève, Faculté de psychologie, 2018.

🧠 Plus de 60 % des patients en psychothérapie disent avoir retrouvé un souvenir enfoui

Mais parmi eux, seule une minorité (moins de 20 %) a pu obtenir une corroboration extérieure de ces souvenirs.
👉 Source : Geraerts et al., 2007 ; synthèse dans Psychologie Clinique, Vol. 24.

🧠 1 faux souvenir sur 5 concerne un événement traumatique

Lorsqu’un souvenir est retrouvé en thérapie, il concerne un traumatisme dans 20 % des cas (violence, abandon, abus). Cela en fait un sujet sensible, nécessitant une prudence clinique extrême.
👉 Source : American Psychological Association, Report on Recovered Memories, 2019.

🧠 En France, la MIVILUDES a signalé des dérives liées aux faux souvenirs dans 11 % des signalements thérapeutiques

Notamment dans des pratiques dites "régressives", certaines suggestions abusives ont conduit à des ruptures familiales ou des dénonciations non fondées.
👉 Source : Rapport MIVILUDES, 2020.

🧠 70 % des victimes de traumatismes précoces présentent une mémoire fragmentée ou floue

Le manque de souvenirs clairs n’est pas rare : c’est même un marqueur fréquent des traumatismes infantiles, ce qui rend l’interprétation thérapeutique délicate et complexe.
👉 Source : Van der Kolk, B. (2014), Le corps n’oublie rien.

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Qu’est-ce qu’un faux souvenir ?

Un faux souvenir, contrairement à ce que l’on pourrait croire, n’est pas un mensonge ni un simple « trou de mémoire ».

Il s’agit d’un souvenir d’un événement qui ne s’est pas produit, mais que la personne expérimente comme profondément réel.

Ce souvenir peut être flou ou précis, anodin ou bouleversant, mais il est toujours incarné émotionnellement, ce qui le rend particulièrement convaincant.

La mémoire : une construction, pas une archive

Contrairement à l’idée commune selon laquelle la mémoire fonctionnerait comme une caméra enregistrant fidèlement le passé, les recherches en neurosciences cognitives et en psychologie clinique ont montré que notre mémoire est reconstructive.

Elle se fabrique dans le présent, à partir de morceaux du passé, d’éléments imaginés, d’associations affectives, de récits entendus, de rêves ou de fantasmes. Elle est donc malléable, suggestible et vulnérable aux distorsions.

Par exemple, vous pouvez être certain d’avoir vu une personne dans un lieu précis… alors que ce souvenir résulte en réalité d’un amalgame d’expériences proches, d’un rêve oublié, ou d’une suggestion subtile entendue des années plus tôt.

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Un phénomène bien documenté en psychologie

Les travaux de la psychologue américaine Elizabeth Loftus, spécialiste des faux souvenirs induits, sont aujourd’hui incontournables.

Dans une expérience célèbre, elle a montré qu’il était possible de faire croire à des personnes qu’elles s’étaient perdues dans un centre commercial étant enfants, simplement en leur racontant cette histoire comme si elle avait été confirmée par leurs proches.

Résultat ? 25 % des sujets ont affirmé se souvenir de cette scène fictive, avec des détails visuels, émotionnels et sensoriels.

Ces recherches posent des questions fondamentales sur la fiabilité du témoignage, mais aussi sur ce que nous considérons comme étant « vrai » dans notre propre histoire. En psychothérapie, où le langage, l’imaginaire et l’affect sont au cœur du processus, cela devient un enjeu clinique majeur.

Faux souvenirs et psychanalyse

Réalité psychique vs réalité historique

La psychanalyse, dès ses origines, s’est heurtée à une énigme centrale : que faire de ces souvenirs qui surgissent en séance, parfois avec une intensité bouleversante, sans que rien ne permette d’en attester la véracité ?

Le patient raconte, le corps frémit, les larmes coulent… mais les faits sont introuvables. Est-ce là une invention, un mensonge, un fantasme ? Ou une vérité d’un autre ordre ?

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Freud : de la séduction réelle au fantasme inconscient

Au départ, Sigmund Freud pensait que les névroses provenaient de souvenirs refoulés d’abus sexuels réels, survenus dans la petite enfance — c’est ce qu’il a appelé la « théorie de la séduction ».

Mais il a rapidement constaté que ces récits n’étaient pas toujours fiables, qu’ils semblaient parfois se construire dans le transfert, et surtout… qu’ils étaient inaccessibles à toute vérification objective.

Il a alors opéré un renversement fondamental : ces scènes dites de séduction ne sont pas forcément des souvenirs historiques, mais des formations de l’inconscient, des fantasmes archaïques, des constructions symboliques organisées autour d’un désir, d’une culpabilité ou d’une défense.

🗣️ « On n’a pas besoin que ce soit arrivé pour que ce soit vrai dans l’inconscient. »

Autrement dit, ce que le sujet dit avoir vécu n’est pas nécessairement arrivé, mais ce récit dit quelque chose de profondément vrai sur sa position subjective, ses conflits internes, ses liens d’attachement ou son histoire familiale.

Réalité psychique versus réalité factuelle

C’est ici que la psychanalyse introduit une distinction essentielle : celle entre réalité psychique et réalité historique.

  • La réalité historique, c’est celle des faits, des événements concrets, objectivement vérifiables.
  • La réalité psychique, c’est celle de l’inconscient : elle ne cherche pas la véracité, mais la cohérence symbolique. Elle s’organise autour des fantasmes, des désirs, des identifications, et des traumatismes vécus dans l’univers interne du sujet.

Ainsi, un faux souvenir peut être un véritable indice clinique : non pas de ce qui s’est produit à l’extérieur, mais de ce qui s’est produit à l’intérieur — dans la vie affective, relationnelle et fantasmatique du sujet.

Les souvenirs-écrans : pièges de la mémoire inconsciente

Freud a aussi décrit un mécanisme fascinant : celui du souvenir-écran.

Il s’agit d’un souvenir vivace, anodin en apparence, qui se fixe dans la mémoire non pas pour son contenu, mais parce qu’il masque autre chose.

Exemple : un patient se souvient avec précision d’un repas d’anniversaire où il a mangé une part de gâteau à la fraise. Rien de choquant, sauf qu’en séance, ce souvenir revient sans cesse avec une charge émotionnelle disproportionnée. L’exploration révèle qu’il est le rideau posé sur une scène de rejet ou de violence symbolique, survenue ce même jour. Le souvenir « vrai » a été refoulé, et l’anodin a pris sa place comme paravent.

🧠 « Le souvenir-écran est le déguisement d’un affect refoulé. »
— Sigmund Freud

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Et aujourd’hui ? La vigilance du thérapeute face aux émergences

La psychanalyse contemporaine, tout comme certaines formes de psychothérapie humaniste, reconnaît l’importance des souvenirs refoulés, mais elle n’élève pas au rang de preuve ce qui surgit en séance.

Elle s’intéresse à ce que ces scènes dévoilent de la structure du sujet, à la façon dont elles s’inscrivent dans le transfert, et aux liens qu’elles entretiennent avec les répétitions, les défenses et les mythes familiaux.

C’est pourquoi la prudence est une éthique centrale du clinicien. Un faux souvenir n’est pas à nier, mais il ne doit pas être confirmé trop vite. Ni vérification, ni disqualification : élaboration.

En psychothérapie : quand le cadre influence le souvenir

Contrairement à une idée reçue, la mémoire ne se libère pas simplement parce qu'on parle.

En psychothérapie, le cadre thérapeutique — autrement dit, l’ambiance relationnelle, la méthode utilisée, le type de questionnement ou même les attentes du psychothérapeute — peut jouer un rôle décisif dans la façon dont les souvenirs émergent, se construisent… ou se déforment.

Quand le psychothérapeute devient co-auteur involontaire du souvenir

Dans certains dispositifs psychothérapeutiques, notamment ceux mobilisant l’imaginaire ou les états modifiés de conscience (hypnose, EMDR, visualisation, thérapies régressives), il arrive que des images mentales puissantes surgissent : scènes de l’enfance, sensations corporelles oubliées, voix anciennes…

Ces scènes sont parfois vécues comme des révélations intimes. Et pourtant, elles peuvent être en grande partie fabriquées dans le transfert, c’est-à-dire dans la relation singulière au thérapeute.

🧠 « Le danger n’est pas le souvenir en lui-même, mais ce que le thérapeute en fait. »
— Jean Cottraux, psychiatre et psychothérapeute

Un simple soupir, une inflexion dans la voix, une reformulation maladroite, une question trop orientée — et voilà que le doute, l’imaginaire ou la peur prennent la forme d’un souvenir. Non pas dans une intention de manipulation, mais par effet de suggestion involontaire.

Le phénomène des souvenirs induits

Les souvenirs induits sont des souvenirs créés ou altérés sous l’influence d’un tiers, souvent dans un contexte émotionnel fort ou de vulnérabilité.

En thérapie, ce phénomène peut être amplifié si :

  • Le thérapeute adopte une posture trop directrice (« Fermez les yeux et voyez ce que vous avez vécu à 4 ans ») ;
  • Il projette ses propres hypothèses sur le patient (« On dirait que vous avez été victime ») ;
  • Il confond l’affect avec la preuve, c’est-à-dire qu’il croit que ce qui est ressenti comme vrai est vrai.
C’est ainsi que certaines pratiques peu encadrées ont pu conduire à la création de faux souvenirs d’abus, avec des conséquences dramatiques : rupture familiale, accusations infondées, syndromes post-traumatiques induits… voire emprise thérapeutique.

Les thérapies à risque : quand l’intensité émotionnelle brouille la vigilance

Certaines approches thérapeutiques, pourtant puissantes et efficaces dans de nombreux cas, comme l’EMDR, l’hypnose ericksonienne ou certaines formes de thérapies transgénérationnelles, peuvent involontairement favoriser la confusion entre réalité psychique et réalité factuelle

si elles sont mal utilisées.

L’activation émotionnelle intense, la confiance dans le thérapeute, et le désir de comprendre son mal-être peuvent alors former un terreau fertile pour des reconstructions mémorielles biaisées.

C’est pourquoi la formation, l’éthique et la supervision du psychothérapeute sont essentielles.

Le cadre : un espace de sécurité, pas un théâtre de suggestion

Un cadre thérapeutique bien tenu ne cherche pas à faire émerger la vérité à tout prix. Il accueille ce qui vient, sans juger, ni confirmer, ni interpréter trop vite.

Il offre un contenant psychique suffisamment stable pour que les souvenirs — qu’ils soient vrais, déformés ou imaginaires — puissent être élaborés, symbolisés, intégrés.

En ce sens, la psychothérapie ne vise pas à faire « retrouver des souvenirs », mais à travailler ce qui s’y attache : les affects, les répétitions, les représentations inconscientes.

🗣️ « Le thérapeute n’est pas là pour valider un récit, mais pour ouvrir un espace où ce récit peut être interrogé. »

Faut-il se méfier de tous les souvenirs retrouvés ?

Pas nécessairement.

Tous les souvenirs retrouvés en thérapie ne sont pas faux.

Certains sont au contraire des fragments refoulés d’événements réels, longtemps enfouis dans l’inconscient pour protéger le sujet d’une douleur insupportable. D’autres sont des reconstructions partiellement exactes, où la forme change mais le fond émotionnel reste pertinent.

Certains souvenirs enfouis sont bel et bien vrais

Il existe des cas où des souvenirs traumatiques réels refont surface après des années : scènes d’agression, de maltraitance, d’abandon…

Leur émergence peut être déclenchée par une odeur, un mot, une image, un contexte émotionnel similaire, ou encore… le cadre de la thérapie.

Ces souvenirs, même s’ils arrivent tardivement, s’intègrent souvent avec cohérence dans l’histoire subjective, sont corroborés par d’autres éléments (récits familiaux, symptômes somatiques, attitudes parentales) et réactivent des affects précis, parfois corporellement ancrés.

Ils ne sont pas à rejeter sous prétexte qu’ils ont « mis du temps à revenir ». Mais ils demandent à être entendus avec finesse, non pas comme une preuve judiciaire, mais comme un matériau psychique à travailler avec prudence et profondeur.

La véracité historique n’est pas le seul critère clinique

Dans une démarche psychanalytique, ce n’est pas la véracité factuelle qui prime, mais la fonction du souvenir dans l’économie psychique du patient.

En d’autres termes : ce n’est pas tant si c’est vrai qui compte, mais pourquoi ce souvenir surgit maintenant, avec cette forme, dans cette relation.

Un faux souvenir peut être psychiquement juste, tandis qu’un souvenir historiquement exact peut être émotionnellement désamorcé, voire dénié.

Le thérapeute doit ainsi faire le pari d’un accueil sans adhésion aveugle, d’une écoute sans précipitation interprétative.

Quand faut-il redoubler de prudence ?

La vigilance s’impose particulièrement lorsque :

  • Le souvenir surgit brutalement, avec une charge émotionnelle massive, mais aucun contexte associatif autour ;
  • Il accuse une tierce personne de faits graves sans que le récit ait été élaboré ni mis en lien avec d’autres éléments de vie ;
  • Le patient semble contraint de « croire à tout prix » à ce souvenir, sous peine de perdre sa cohérence identitaire ou son alliance avec le thérapeute.

Dans ces cas, la prudence thérapeutique n’est pas de la méfiance, mais une forme d’éthique : éviter d’ajouter du traumatisme au traumatisme, en projetant une vérité qui ne serait pas celle du sujet.

Croire ou élaborer ? Telle est la question

Ce n’est pas parce qu’un souvenir surgit qu’il faut s’y agripper.

Ni parce qu’il est flou qu’il faut le rejeter. Le travail thérapeutique consiste à ouvrir l’espace psychique où le souvenir — vrai ou faux — peut être raconté, interprété, transformé.

🧠 « Le souvenir retrouvé n’est pas une fin en soi. C’est un début. Celui de la symbolisation. »
— René Roussillon

Quel rôle pour le psychothérapeute ?

Face à l’émergence d’un faux souvenir ou d’un souvenir retrouvé, le thérapeute se trouve dans une position délicate et cruciale.

Il n’est ni enquêteur, ni juge, ni garant de la vérité historique. Il est avant tout gardien du cadre, garant d’un espace où la parole du patient peut se déployer librement, sans être validée à tout prix, ni réfutée brutalement.

Ni croire, ni nier : accompagner l’élaboration

L’une des plus grandes responsabilités du thérapeute est de ne pas figer le souvenir dans une catégorie : vrai ou faux.

Ce qui importe, c’est de permettre au patient de travailler avec ce souvenir, d’explorer ce qu’il signifie, ce qu’il touche, ce qu’il défend ou ce qu’il symbolise.

Le thérapeute doit offrir une présence contenante, une parole sobre, des relances ouvertes, sans imposer sa grille de lecture. Toute interprétation prématurée peut renforcer une croyance rigide ou, au contraire, produire un sentiment de trahison chez le patient.

🗣️ « Ce n’est pas parce qu’un souvenir est faux qu’il n’a pas de valeur. Ce n’est pas parce qu’il est vrai qu’il est déjà compris. »

Accueillir sans confirmer, questionner sans suggérer

La ligne de crête clinique, ici, est étroite. D’un côté, il faut accueillir l’expérience subjective du patient, avec sa charge émotionnelle, ses images, ses affects. De l’autre, il convient de ne pas céder à la tentation de la suggestion, de la confirmation hâtive ou de l’adhésion affective.

Cela implique de :

  • Poser des questions ouvertes : « Que vous évoque cette scène ? », « Ce souvenir, vous le voyez ou vous le ressentez ? »
  • Laisser du flou là où il y a du flou, sans chercher à reconstruire un récit logique trop vite.
  • Explorer les résonances émotionnelles, les symboliques, les répétitions, sans chercher l’origine comme une pièce manquante à insérer dans le puzzle de la vie.

Le transfert, cet espace de réactivation sensible

Dans toute relation thérapeutique, le transfert est à l’œuvre : le patient attribue au thérapeute des rôles inconscients (sauveur, persécuteur, parent, témoin, traître…).

Ce transfert peut colorer l’émergence de souvenirs, les organiser autour de désirs de reconnaissance, de réparation ou de vengeance.

Le thérapeute, s’il n’est pas au clair avec ses propres zones sensibles, peut alors agir sans le vouloir comme catalyseur de faux souvenirs, en confirmant ce que le patient projette… ou en fuyant ce qui le dérange.

🧠 « Tout thérapeute travaille à la fois avec ce que le patient dit, ce qu’il tait, et ce qu’il transfère. »

C’est pourquoi la supervision régulière, l’analyse personnelle et une formation rigoureuse sont indispensables à toute pratique thérapeutique.

Responsabilité éthique du clinicien : ne pas ajouter de la confusion au trouble

Dans les cas de souvenirs graves (abus sexuels, violences familiales, inceste), le thérapeute se trouve parfois pris dans un dilemme douloureux : croire le patient et risquer d’accuser à tort, ou suspendre le jugement et être perçu comme complice du déni.

La seule voie éthique consiste à :

  • Respecter la temporalité du patient, sans pousser au dévoilement.
  • Encourager l’élaboration symbolique, plutôt que la recherche de preuves.
  • Rester neutre mais pas indifférent, présent mais pas intrusif.

Car un psychologue ou un psychothérapeute mal positionné peut devenir agissant : au lieu d’aider à la reconstruction de soi, il participe malgré lui à la fixation du trauma sous une forme rigide, irréconciliable, clivée.

Pourquoi fabrique-t-on de faux souvenirs ?

Créer un faux souvenir n’est ni un acte volontaire, ni une illusion banale.

C’est souvent une tentative inconsciente du psychisme pour survivre, s’adapter, ou donner du sens à une expérience intérieure insoutenable ou indicible.

Ces souvenirs sont des productions signifiantes, des réponses symboliques à des conflits profonds, des mécanismes de défense sophistiqués.

Le faux souvenir comme réponse à une faille narrative

Le psychisme humain a besoin de cohérence autobiographique.

Quand une douleur ancienne n’a pas été nommée, quand un vide s’installe dans la mémoire, ou quand une angoisse surgit sans explication rationnelle, le sujet peut combler ce vide par une construction mémorielle.

Ce n’est pas de la fabulation. C’est une manière de réparer un trou dans le récit de soi, de donner une forme à l’informe, de mettre des mots — ou des images — là où il n’y avait qu’un affect brut.

Exemples :

  • Un adulte angoissé depuis toujours sans savoir pourquoi peut créer un souvenir d’abandon dans un supermarché à 4 ans. Ce souvenir, fictif ou exagéré, lui permet de relier une peur diffuse à un scénario intelligible.
  • Une patiente très en colère contre sa mère, sans souvenir clair de conflits, peut évoquer une scène floue de gifle injuste : le souvenir donne une figure tangible à un vécu de rejet structurel.

Le faux souvenir comme défense psychique

Dans la logique psychanalytique, certains faux souvenirs sont des formations de compromis.

Ils permettent de :

  • Défendre contre une vérité trop brutale, refoulée ou insupportable (comme un inceste ou une trahison réelle) ;
  • Désigner symboliquement un conflit intrapsychique, comme le désir ambivalent envers un parent ;
  • Déléguer une faute interne à un événement externe, permettant ainsi une forme d’expiation ou de révolte.

Le faux souvenir devient alors un symptôme, une métaphore vivante que le sujet prend pour du réel, parce qu’il en a besoin pour survivre psychiquement.

Une invention pour nommer l’innommable

Dans certains cas de traumatismes précoces, notamment ceux vécus avant l’acquisition du langage (traumas prénataux, violences émotionnelles précoces, négligence affective), il n’existe aucune trace verbale dans la mémoire consciente.

Mais le corps se souvient. L’affect s’imprime. Et un jour, une image mentale émerge — souvent dans un contexte thérapeutique sécurisant — pour tenter de donner forme à l’invisible.

🗣️ « L’image fausse devient le véhicule d’une vérité émotionnelle. »

Fantasme, culpabilité et besoin de réparation

Certains faux souvenirs ne viennent pas du trauma… mais du désir de punition, de reconnaissance ou de réparation.

Un patient profondément coupable de ses propres désirs ou ressentiments peut fabriquer inconsciemment un souvenir dans lequel il est victime, afin de rétablir un équilibre symbolique. C’est ce qu’on appelle parfois une mise en scène défensive, où l’imaginaire vient masquer ou transformer un affect trop chargé pour rester brut.

Ces constructions peuvent aussi servir à :

  • Justifier une souffrance actuelle quand aucune cause visible ne semble l’expliquer ;
  • Obtenir une reconnaissance extérieure, notamment familiale ou sociale ;
  • Rétablir une forme de justice subjective, face à un sentiment d’injustice chronique.

Le vrai danger : la confusion entre réparation et accusation

Lorsqu’un faux souvenir implique une tierce personne, surtout dans le cadre d’un souvenir de violence ou d’abus, le terrain devient particulièrement glissant.

Il ne s’agit plus uniquement de la vérité intérieure du patient, mais d’un récit potentiellement accusatoire, pouvant impacter des liens familiaux, conjugaux, ou sociaux, parfois de manière irréversible.

Entre vérité psychique et conséquences réelles

Dans certains cas, ce que le patient élabore en thérapie peut être une mise en forme symbolique de blessures anciennes.

Mais s’il prend cette construction pour une vérité historique, il peut projeter la faute sur un proche — souvent un parent, un frère, un éducateur — sans pouvoir distinguer ce qui relève de l’imaginaire, de la généralisation, ou d’une réalité transformée par le temps.

🗣️ « L’accusation est parfois la scène par laquelle le sujet demande réparation, pas la preuve qu’un crime a eu lieu. »

Dans cette configuration, la frontière entre élaboration thérapeutique et justice subjective devient poreuse. Le faux souvenir, utilisé comme levier de réparation narcissique, peut prendre la forme d’une plainte concrète, voire d’une action en justice, sans que la mémoire ait été suffisamment travaillée.

Le risque de figer la souffrance dans un récit accusatoire

Lorsque le souvenir devient figé, non questionnable, et que la personne s’identifie totalement à une position de victime, le travail thérapeutique peut se gripper.

Le patient cherche alors des confirmations, des alliés, un verdict, et non plus une élaboration ou un apaisement.

Le thérapeute, dans ce contexte, peut être :

  • Soit transformé en juge inconscient, qui valide ou réfute les faits ;
  • Soit mis à l’épreuve dans le transfert : s’il ne croit pas le souvenir, il est assimilé à l’agresseur ou au déni familial.

Le danger est double :

  1. Pour le patient : il risque de s’enfermer dans une fiction douloureuse, au lieu d’ouvrir un espace de transformation symbolique.
  2. Pour la relation : le lien thérapeutique peut se rompre, ou se transformer en alliance rigide, basée sur une vérité non négociable.

Le thérapeute face à la responsabilité symbolique et sociale

Dans de tels cas, la responsabilité clinique et éthique du thérapeute est immense. Il ne s’agit ni de nier la parole du patient, ni de l’encourager aveuglément, mais de lui permettre de penser cette parole, d’en explorer les racines, les motifs, les déplacements.

Il faut créer un espace de suspension, où le patient puisse dire :

« Je me souviens de cela… et je ne sais pas si c’est arrivé. Mais c’est là, en moi, et ça me bouleverse. »

Ce type de positionnement, entre reconnaissance et incertitude, permet de travailler la fonction du souvenir, au lieu de se perdre dans sa factualité.

Et si le souvenir est vrai ?

La prudence ne signifie pas le scepticisme.

Parfois, le souvenir est authentique, même si sa forme est floue. Il peut s’agir d’un abus refoulé, d’une scène d’humiliation, d’une violence symbolique. Dans ce cas, l’écoute bienveillante, sans pression, sans besoin de preuve, est souvent le premier geste réparateur.

L’objectif de la thérapie n’est ni de valider ni d infirmer les faits, mais de réparer la subjectivité blessée, quelle que soit la part de vérité historique contenue dans le souvenir.

Croire ou comprendre ? Le travail thérapeutique autour des souvenirs

Face à un souvenir retrouvé, qu’il soit exact, déformé ou fictif, le cœur du travail thérapeutique n’est pas d’en vérifier l’authenticité, mais d’en comprendre la fonction, la charge affective et la place dans le récit identitaire du patient.

Car en thérapie, on ne travaille pas avec des archives… mais avec des histoires vécues comme vraies, traversées par l’inconscient, le désir, le fantasme et la mémoire émotionnelle.

🧠 « Ce n’est pas tant de vérité historique dont le sujet a besoin, mais de sens. »
— Paul-Claude Racamier

L’élaboration, clé de la transformation psychique

Le rôle du thérapeute est de soutenir le processus d’élaboration psychique, c’est-à-dire d’aider le patient à :

  • Relier le souvenir à ses émotions présentes ;
  • Explorer ce que ce récit vient représenter ou masquer ;
  • Comprendre les liens symboliques et affectifs entre les différentes couches de son histoire ;
  • Et peu à peu, transformer ce qui était figé en quelque chose de vivant, pensable, mobile.

Dans ce mouvement, l’incertitude sur la factualité du souvenir devient une ressource : elle oblige à penser au lieu de savoir, à symboliser au lieu de figer, à rêver au lieu de répéter.

De la croyance rigide à l’appropriation subjective

Croire aveuglément à un souvenir retrouvé peut renforcer une posture défensive ou victimaire, en empêchant toute mise en mouvement.

À l’inverse, le travail thérapeutique vise à une appropriation subjective : le patient peut dire un jour, non pas « c’est arrivé », mais « je comprends pourquoi j’ai eu besoin de croire que c’est arrivé ».

Ce déplacement est souvent le début d’une véritable guérison intérieure.

Il ne s’agit plus de savoir si c’est vrai… mais de se libérer de l’emprise du souvenir, de retrouver sa liberté psychique, de reprendre la main sur son propre récit de vie.

Le thérapeute, un accompagnant de la mémoire vivante

En fin de compte, le thérapeute est un passeur, un gardien du processus, pas un arbitre.

Il accompagne le patient dans l’exploration des couches mémorielles, affectives et symboliques de son histoire, en lui offrant un cadre stable, une présence soutenante et une parole qui ne colonise pas son expérience, mais la fait résonner.

Il sait que dans l’inconscient, le souvenir est moins une preuve qu’un poème, un morceau de vérité subjective à déchiffrer ensemble, pas à imposer.

Conclusion : Faux ou vrai, un souvenir n’est jamais neutre

Un faux souvenir n’est jamais « rien ».

Même s’il ne correspond à aucun fait objectif, il parle, il exprime, il désigne une douleur réelle, une quête de sens, un besoin de réparer ou de comprendre.

En psychothérapie comme en psychanalyse, il ne s’agit donc pas de traquer le vrai, mais d’accueillir le vécu du patient avec finesse, prudence et ouverture.

La mémoire est un tissu fragile, tissé de perceptions, d’oublis, de fantasmes et d’émotions. Elle se reconstruit à chaque instant, au gré de nos liens, de nos blessures et de nos espoirs.

🗣️ « Ce que j’ai cru vivre m’a construit autant que ce que j’ai réellement vécu. »

C’est pourquoi le psychologue ou le psychothérapeute n’a pas pour mission de trancher entre mensonge et vérité, mais de soutenir le patient dans l’exploration de ce qui fait symptôme, récit, mythe personnel. Et parfois, ce travail suffit à libérer, sans qu’il soit besoin de savoir.

FAQ – Faux souvenirs : ce que vous vous demandez souvent

Peut-on inventer un souvenir sans s’en rendre compte ?

Oui, et cela ne signifie pas que vous mentez.

Le cerveau est une fabrique d’histoires : il comble parfois les trous de mémoire avec des images ou récits crédibles, mais inexacts. Ces souvenirs peuvent surgir à partir d’un rêve, d’un récit entendu ou d’une émotion forte. En thérapie, on ne cherche pas à juger leur véracité, mais à comprendre ce qu’ils révèlent de vous, de vos ressentis, et de votre histoire intérieure.

Est-ce dangereux de croire à un faux souvenir ?

Cela peut l’être si le souvenir devient rigide, accusatoire, ou s’il remplace toute autre compréhension de soi.

Mais en thérapie, un faux souvenir n’est pas un piège : c’est un message du psychisme. Le danger, ce n’est pas l’erreur, mais l’absence d’élaboration. Être accompagné permet de donner du sens à ce souvenir, sans en faire une vérité absolue, ni le rejeter. Ce travail permet souvent d’apaiser des douleurs profondes.

Comment les thérapeutes traitent-ils les faux souvenirs ?

Un thérapeute bien formé accueille le souvenir avec respect, sans le confirmer ni le nier.

Il vous aide à explorer ce qu’il signifie, ce qu’il vient exprimer, et comment il s’inscrit dans votre parcours. Il ne cherche pas à savoir si c’est « vrai », mais à comprendre pourquoi cela vous touche, maintenant. Sa posture éthique consiste à vous accompagner dans cette exploration, tout en protégeant votre espace de pensée et votre intégrité psychique.

Pourquoi ai-je des souvenirs flous ou contradictoires de mon enfance ?

C’est très courant. L’enfance est un temps où les souvenirs se mêlent au ressenti, à l’imaginaire et à ce qu’on vous a raconté.

Les émotions fortes, les silences familiaux ou les événements mal compris peuvent brouiller la mémoire. En thérapie, ces flous ne sont pas des obstacles, mais des points d’entrée : ce qui est confus mérite d’être écouté. Ce n’est pas la précision qui soigne, c’est le lien que vous créez avec ce souvenir.

L’hypnose ou l’EMDR risquent-ils de créer de faux souvenirs ?

Ils peuvent, s’ils sont mal utilisés ou pratiqués de manière trop directive.

Mais entre de bonnes mains, ces outils peuvent au contraire aider à retrouver des sensations, des émotions enfouies, sans imposer d’interprétation. Le plus important est de consulter un thérapeute formé, respectueux, et attentif à ne jamais suggérer de scénario. Ce que vous vivez reste à vous. L’hypnose et l’EMDR doivent toujours respecter votre rythme et votre subjectivité.

Un souvenir peut-il changer avec le temps ?

Oui, et c’est même tout à fait naturel. Les souvenirs ne sont pas figés : ils évoluent selon nos émotions, nos croyances et notre histoire.

Ce que vous vous rappelez aujourd’hui peut être différent de ce que vous ressentiez à l’époque. En thérapie, on ne cherche pas une mémoire parfaite, mais une mémoire habitée, vivante, qui vous aide à comprendre ce que vous avez vécu… ou cru vivre.

Est-ce normal d’avoir des souvenirs d’enfance dont je doute ?

Oui, c’est très courant.

La mémoire de l’enfance est souvent floue, parcellaire, et influencée par l’imaginaire. Vous pouvez ressentir quelque chose de très fort sans pouvoir dire si cela a vraiment eu lieu. Ce doute n’est pas un problème : il est même parfois le point de départ d’un travail thérapeutique précieux, car ce qui compte, c’est le sens que vous donnez à ce souvenir, pas sa véracité absolue.

Peut-on confondre un rêve ou un film avec un souvenir réel ?

Oui, cela arrive plus souvent qu’on ne le pense.

Si une scène vous a marqué émotionnellement, elle peut s’infiltrer dans votre mémoire comme si elle vous appartenait. Le cerveau ne distingue pas toujours clairement entre ce qu’il a vu, rêvé ou vécu. En thérapie, on accueille ces images pour ce qu’elles sont : des signaux psychiques, des représentations symboliques, et non forcément des archives fidèles de votre passé.

Ai-je besoin de savoir si un souvenir est vrai pour avancer ?

Pas forcément.

Ce qui vous aide à avancer, c’est de mettre en mots ce que vous ressentez, de comprendre ce que le souvenir évoque, de faire du lien entre vos émotions et votre histoire. Même un souvenir incertain peut libérer une parole, ouvrir une prise de conscience, ou apaiser une souffrance. En thérapie, ce n’est pas le vrai ou le faux qui compte, mais le travail de sens et de transformation.

Un souvenir peut-il apparaître soudainement à l’âge adulte ?

Oui, certains souvenirs — vrais ou symboliques — peuvent resurgir à l’âge adulte, parfois à l’occasion d’un événement déclencheur : une naissance, une perte, une thérapie, ou un choc émotionnel.

Ce surgissement peut surprendre, troubler, ou bouleverser. Il ne s’agit pas forcément d’une "révélation", mais souvent d’une mise en forme d’un ressenti ancien qui demande à être entendu, compris et intégré.

Pourquoi certaines personnes ont-elles des souvenirs d’abus sans preuves ?

Parce que la mémoire traumatique ne se manifeste pas toujours sous forme de faits précis.

Elle peut rester enfouie, revenir en flashs, ou s’exprimer par des symptômes. Certains récits émergent comme des tentatives de mettre en scène une douleur ancienne, même sans preuve concrète. Cela ne veut pas dire que tout est vrai ou faux, mais que le vécu mérite d’être écouté avec délicatesse, sans précipitation ni jugement.

Peut-on se souvenir d’un événement qu’on avait totalement oublié ?

Oui, cela peut arriver, surtout si le souvenir était associé à une émotion trop intense pour être intégrée à l’époque.

On parle parfois de refoulement : le souvenir a été mis à distance pour protéger la psyché. Avec le temps, ou dans un cadre thérapeutique contenant, il peut remonter, sous forme d’images, de rêves ou de sensations. Ce retour peut être déstabilisant, mais aussi libérateur, s’il est bien accompagné.

Est-ce qu’un souvenir retrouvé doit forcément être raconté à sa famille ?

Non, pas nécessairement. Ce souvenir vous appartient d’abord à vous.

Avant de le partager, il est important de le comprendre, l’intégrer, et l’élaborer, souvent avec l’aide d’un thérapeute. Parler trop tôt, sans avoir fait ce chemin intérieur, peut parfois créer des tensions ou des malentendus. Il est légitime de garder certaines choses pour soi, ou d’attendre le bon moment, si jamais il se présente.

Et si j’ai peur que mes souvenirs ne soient pas vrais ?

C’est une inquiétude légitime.

Vous avez le droit de douter, de questionner, de ne pas tout savoir. Un souvenir n’a pas besoin d’être "vérifié" pour être digne d’attention. Ce qui importe, c’est ce que vous ressentez à son sujet, et ce qu’il vient toucher en vous. En thérapie, l’enjeu n’est pas de faire la lumière à tout prix, mais de vous aider à y voir plus clair en vous-même, en sécurité.

Mon thérapeute doit-il me dire si mon souvenir est vrai ou non ?

Non, ce n’est ni son rôle, ni possible dans la plupart des cas.

Un bon thérapeute vous accompagne sans trancher. Il ne vous impose pas sa lecture, ne cherche pas à prouver ou à invalider. Il vous aide à explorer ce que vous vivez, ce que ce souvenir veut dire, ce qu’il vient réparer ou exprimer. Sa neutralité bienveillante est là pour vous permettre de penser librement, sans pression.

Par Frédérique Korzine,
psychanalyste à Versailles
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Psychanalyse, hypnose, coaching, supervision et thérapies brèves.

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