Lorsque j’ai reçu Anna, 34 ans, elle venait consulter pour des crises d’angoisse inexpliquées. En hypnose, une image lui est revenue : une scène floue, dérangeante, où elle aurait été victime d’un abus dans son enfance. Elle en était bouleversée, persuadée d’avoir retrouvé « la vérité ». Mais en poursuivant le travail, nous avons découvert que cette scène, bien que douloureuse, ne correspondait à aucun événement objectivement vérifiable. Fallait-il la croire ? Devais-je la détromper ? Ou simplement écouter ce que ce souvenir voulait dire, même s’il n’avait jamais existé ?
Les faux souvenirs ne sont pas des affabulations. Ils sont le langage de l’inconscient, la tentative du psychisme de donner une forme à ce qui échappe à la mémoire consciente. En psychanalyse comme en psychothérapie, ils doivent être traités avec respect, prudence et sens clinique, car leur rôle symbolique est souvent bien plus important que leur véracité historique.
Entre vérité et imaginaire, ils tissent le roman intérieur du sujet.
Bonne lecture. 😉
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Selon les recherches d’Elizabeth Loftus (Université de Californie, Irvine), environ 25 % des participants à ses études se souviennent d’un événement fictif suggéré comme s’il était réel (ex. : s’être perdu enfant dans un centre commercial).
👉 Source : Loftus, E. (1997). Creating False Memories. Scientific American.
D’après une étude de l’Université de Genève, la mémoire autobiographique est inexacte dans 36 % des cas en moyenne sur les souvenirs remontant à l’enfance.
👉 Source : Université de Genève, Faculté de psychologie, 2018.
Mais parmi eux, seule une minorité (moins de 20 %) a pu obtenir une corroboration extérieure de ces souvenirs.
👉 Source : Geraerts et al., 2007 ; synthèse dans Psychologie Clinique, Vol. 24.
Lorsqu’un souvenir est retrouvé en thérapie, il concerne un traumatisme dans 20 % des cas (violence, abandon, abus). Cela en fait un sujet sensible, nécessitant une prudence clinique extrême.
👉 Source : American Psychological Association, Report on Recovered Memories, 2019.
Notamment dans des pratiques dites "régressives", certaines suggestions abusives ont conduit à des ruptures familiales ou des dénonciations non fondées.
👉 Source : Rapport MIVILUDES, 2020.
Le manque de souvenirs clairs n’est pas rare : c’est même un marqueur fréquent des traumatismes infantiles, ce qui rend l’interprétation thérapeutique délicate et complexe.
👉 Source : Van der Kolk, B. (2014), Le corps n’oublie rien.
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Ce souvenir peut être flou ou précis, anodin ou bouleversant, mais il est toujours incarné émotionnellement, ce qui le rend particulièrement convaincant.
Elle se fabrique dans le présent, à partir de morceaux du passé, d’éléments imaginés, d’associations affectives, de récits entendus, de rêves ou de fantasmes. Elle est donc malléable, suggestible et vulnérable aux distorsions.
Par exemple, vous pouvez être certain d’avoir vu une personne dans un lieu précis… alors que ce souvenir résulte en réalité d’un amalgame d’expériences proches, d’un rêve oublié, ou d’une suggestion subtile entendue des années plus tôt.
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Dans une expérience célèbre, elle a montré qu’il était possible de faire croire à des personnes qu’elles s’étaient perdues dans un centre commercial étant enfants, simplement en leur racontant cette histoire comme si elle avait été confirmée par leurs proches.
Résultat ? 25 % des sujets ont affirmé se souvenir de cette scène fictive, avec des détails visuels, émotionnels et sensoriels.
Ces recherches posent des questions fondamentales sur la fiabilité du témoignage, mais aussi sur ce que nous considérons comme étant « vrai » dans notre propre histoire. En psychothérapie, où le langage, l’imaginaire et l’affect sont au cœur du processus, cela devient un enjeu clinique majeur.
Le patient raconte, le corps frémit, les larmes coulent… mais les faits sont introuvables. Est-ce là une invention, un mensonge, un fantasme ? Ou une vérité d’un autre ordre ?
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Mais il a rapidement constaté que ces récits n’étaient pas toujours fiables, qu’ils semblaient parfois se construire dans le transfert, et surtout… qu’ils étaient inaccessibles à toute vérification objective.
Il a alors opéré un renversement fondamental : ces scènes dites de séduction ne sont pas forcément des souvenirs historiques, mais des formations de l’inconscient, des fantasmes archaïques, des constructions symboliques organisées autour d’un désir, d’une culpabilité ou d’une défense.
🗣️ « On n’a pas besoin que ce soit arrivé pour que ce soit vrai dans l’inconscient. »
Autrement dit, ce que le sujet dit avoir vécu n’est pas nécessairement arrivé, mais ce récit dit quelque chose de profondément vrai sur sa position subjective, ses conflits internes, ses liens d’attachement ou son histoire familiale.
Ainsi, un faux souvenir peut être un véritable indice clinique : non pas de ce qui s’est produit à l’extérieur, mais de ce qui s’est produit à l’intérieur — dans la vie affective, relationnelle et fantasmatique du sujet.
Il s’agit d’un souvenir vivace, anodin en apparence, qui se fixe dans la mémoire non pas pour son contenu, mais parce qu’il masque autre chose.
Exemple : un patient se souvient avec précision d’un repas d’anniversaire où il a mangé une part de gâteau à la fraise. Rien de choquant, sauf qu’en séance, ce souvenir revient sans cesse avec une charge émotionnelle disproportionnée. L’exploration révèle qu’il est le rideau posé sur une scène de rejet ou de violence symbolique, survenue ce même jour. Le souvenir « vrai » a été refoulé, et l’anodin a pris sa place comme paravent.
🧠 « Le souvenir-écran est le déguisement d’un affect refoulé. »
— Sigmund Freud
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Elle s’intéresse à ce que ces scènes dévoilent de la structure du sujet, à la façon dont elles s’inscrivent dans le transfert, et aux liens qu’elles entretiennent avec les répétitions, les défenses et les mythes familiaux.
C’est pourquoi la prudence est une éthique centrale du clinicien. Un faux souvenir n’est pas à nier, mais il ne doit pas être confirmé trop vite. Ni vérification, ni disqualification : élaboration.
En psychothérapie, le cadre thérapeutique — autrement dit, l’ambiance relationnelle, la méthode utilisée, le type de questionnement ou même les attentes du psychothérapeute — peut jouer un rôle décisif dans la façon dont les souvenirs émergent, se construisent… ou se déforment.
Ces scènes sont parfois vécues comme des révélations intimes. Et pourtant, elles peuvent être en grande partie fabriquées dans le transfert, c’est-à-dire dans la relation singulière au thérapeute.
🧠 « Le danger n’est pas le souvenir en lui-même, mais ce que le thérapeute en fait. »
— Jean Cottraux, psychiatre et psychothérapeute
Un simple soupir, une inflexion dans la voix, une reformulation maladroite, une question trop orientée — et voilà que le doute, l’imaginaire ou la peur prennent la forme d’un souvenir. Non pas dans une intention de manipulation, mais par effet de suggestion involontaire.
En thérapie, ce phénomène peut être amplifié si :
C’est ainsi que certaines pratiques peu encadrées ont pu conduire à la création de faux souvenirs d’abus, avec des conséquences dramatiques : rupture familiale, accusations infondées, syndromes post-traumatiques induits… voire emprise thérapeutique.
Certaines approches thérapeutiques, pourtant puissantes et efficaces dans de nombreux cas, comme l’EMDR, l’hypnose ericksonienne ou certaines formes de thérapies transgénérationnelles, peuvent involontairement favoriser la confusion entre réalité psychique et réalité factuelle
si elles sont mal utilisées.
L’activation émotionnelle intense, la confiance dans le thérapeute, et le désir de comprendre son mal-être peuvent alors former un terreau fertile pour des reconstructions mémorielles biaisées.
Il offre un contenant psychique suffisamment stable pour que les souvenirs — qu’ils soient vrais, déformés ou imaginaires — puissent être élaborés, symbolisés, intégrés.
En ce sens, la psychothérapie ne vise pas à faire « retrouver des souvenirs », mais à travailler ce qui s’y attache : les affects, les répétitions, les représentations inconscientes.
🗣️ « Le thérapeute n’est pas là pour valider un récit, mais pour ouvrir un espace où ce récit peut être interrogé. »
Certains sont au contraire des fragments refoulés d’événements réels, longtemps enfouis dans l’inconscient pour protéger le sujet d’une douleur insupportable. D’autres sont des reconstructions partiellement exactes, où la forme change mais le fond émotionnel reste pertinent.
Leur émergence peut être déclenchée par une odeur, un mot, une image, un contexte émotionnel similaire, ou encore… le cadre de la thérapie.
Ces souvenirs, même s’ils arrivent tardivement, s’intègrent souvent avec cohérence dans l’histoire subjective, sont corroborés par d’autres éléments (récits familiaux, symptômes somatiques, attitudes parentales) et réactivent des affects précis, parfois corporellement ancrés.
Ils ne sont pas à rejeter sous prétexte qu’ils ont « mis du temps à revenir ». Mais ils demandent à être entendus avec finesse, non pas comme une preuve judiciaire, mais comme un matériau psychique à travailler avec prudence et profondeur.
En d’autres termes : ce n’est pas tant si c’est vrai qui compte, mais pourquoi ce souvenir surgit maintenant, avec cette forme, dans cette relation.
Un faux souvenir peut être psychiquement juste, tandis qu’un souvenir historiquement exact peut être émotionnellement désamorcé, voire dénié.
Le thérapeute doit ainsi faire le pari d’un accueil sans adhésion aveugle, d’une écoute sans précipitation interprétative.
Dans ces cas, la prudence thérapeutique n’est pas de la méfiance, mais une forme d’éthique : éviter d’ajouter du traumatisme au traumatisme, en projetant une vérité qui ne serait pas celle du sujet.
Ni parce qu’il est flou qu’il faut le rejeter. Le travail thérapeutique consiste à ouvrir l’espace psychique où le souvenir — vrai ou faux — peut être raconté, interprété, transformé.
🧠 « Le souvenir retrouvé n’est pas une fin en soi. C’est un début. Celui de la symbolisation. »
— René Roussillon
Il n’est ni enquêteur, ni juge, ni garant de la vérité historique. Il est avant tout gardien du cadre, garant d’un espace où la parole du patient peut se déployer librement, sans être validée à tout prix, ni réfutée brutalement.
Ce qui importe, c’est de permettre au patient de travailler avec ce souvenir, d’explorer ce qu’il signifie, ce qu’il touche, ce qu’il défend ou ce qu’il symbolise.
Le thérapeute doit offrir une présence contenante, une parole sobre, des relances ouvertes, sans imposer sa grille de lecture. Toute interprétation prématurée peut renforcer une croyance rigide ou, au contraire, produire un sentiment de trahison chez le patient.
🗣️ « Ce n’est pas parce qu’un souvenir est faux qu’il n’a pas de valeur. Ce n’est pas parce qu’il est vrai qu’il est déjà compris. »
Cela implique de :
Ce transfert peut colorer l’émergence de souvenirs, les organiser autour de désirs de reconnaissance, de réparation ou de vengeance.
Le thérapeute, s’il n’est pas au clair avec ses propres zones sensibles, peut alors agir sans le vouloir comme catalyseur de faux souvenirs, en confirmant ce que le patient projette… ou en fuyant ce qui le dérange.
🧠 « Tout thérapeute travaille à la fois avec ce que le patient dit, ce qu’il tait, et ce qu’il transfère. »
C’est pourquoi la supervision régulière, l’analyse personnelle et une formation rigoureuse sont indispensables à toute pratique thérapeutique.
La seule voie éthique consiste à :
Car un psychologue ou un psychothérapeute mal positionné peut devenir agissant : au lieu d’aider à la reconstruction de soi, il participe malgré lui à la fixation du trauma sous une forme rigide, irréconciliable, clivée.
Ces souvenirs sont des productions signifiantes, des réponses symboliques à des conflits profonds, des mécanismes de défense sophistiqués.
Quand une douleur ancienne n’a pas été nommée, quand un vide s’installe dans la mémoire, ou quand une angoisse surgit sans explication rationnelle, le sujet peut combler ce vide par une construction mémorielle.
Ce n’est pas de la fabulation. C’est une manière de réparer un trou dans le récit de soi, de donner une forme à l’informe, de mettre des mots — ou des images — là où il n’y avait qu’un affect brut.
Exemples :
Ils permettent de :
Le faux souvenir devient alors un symptôme, une métaphore vivante que le sujet prend pour du réel, parce qu’il en a besoin pour survivre psychiquement.
Mais le corps se souvient. L’affect s’imprime. Et un jour, une image mentale émerge — souvent dans un contexte thérapeutique sécurisant — pour tenter de donner forme à l’invisible.
🗣️ « L’image fausse devient le véhicule d’une vérité émotionnelle. »
Un patient profondément coupable de ses propres désirs ou ressentiments peut fabriquer inconsciemment un souvenir dans lequel il est victime, afin de rétablir un équilibre symbolique. C’est ce qu’on appelle parfois une mise en scène défensive, où l’imaginaire vient masquer ou transformer un affect trop chargé pour rester brut.
Ces constructions peuvent aussi servir à :
Il ne s’agit plus uniquement de la vérité intérieure du patient, mais d’un récit potentiellement accusatoire, pouvant impacter des liens familiaux, conjugaux, ou sociaux, parfois de manière irréversible.
Mais s’il prend cette construction pour une vérité historique, il peut projeter la faute sur un proche — souvent un parent, un frère, un éducateur — sans pouvoir distinguer ce qui relève de l’imaginaire, de la généralisation, ou d’une réalité transformée par le temps.
🗣️ « L’accusation est parfois la scène par laquelle le sujet demande réparation, pas la preuve qu’un crime a eu lieu. »
Dans cette configuration, la frontière entre élaboration thérapeutique et justice subjective devient poreuse. Le faux souvenir, utilisé comme levier de réparation narcissique, peut prendre la forme d’une plainte concrète, voire d’une action en justice, sans que la mémoire ait été suffisamment travaillée.
Le patient cherche alors des confirmations, des alliés, un verdict, et non plus une élaboration ou un apaisement.
Le thérapeute, dans ce contexte, peut être :
Le danger est double :
Il faut créer un espace de suspension, où le patient puisse dire :
« Je me souviens de cela… et je ne sais pas si c’est arrivé. Mais c’est là, en moi, et ça me bouleverse. »
Ce type de positionnement, entre reconnaissance et incertitude, permet de travailler la fonction du souvenir, au lieu de se perdre dans sa factualité.
Parfois, le souvenir est authentique, même si sa forme est floue. Il peut s’agir d’un abus refoulé, d’une scène d’humiliation, d’une violence symbolique. Dans ce cas, l’écoute bienveillante, sans pression, sans besoin de preuve, est souvent le premier geste réparateur.
L’objectif de la thérapie n’est ni de valider ni d infirmer les faits, mais de réparer la subjectivité blessée, quelle que soit la part de vérité historique contenue dans le souvenir.
Car en thérapie, on ne travaille pas avec des archives… mais avec des histoires vécues comme vraies, traversées par l’inconscient, le désir, le fantasme et la mémoire émotionnelle.
🧠 « Ce n’est pas tant de vérité historique dont le sujet a besoin, mais de sens. »
— Paul-Claude Racamier
Dans ce mouvement, l’incertitude sur la factualité du souvenir devient une ressource : elle oblige à penser au lieu de savoir, à symboliser au lieu de figer, à rêver au lieu de répéter.
À l’inverse, le travail thérapeutique vise à une appropriation subjective : le patient peut dire un jour, non pas « c’est arrivé », mais « je comprends pourquoi j’ai eu besoin de croire que c’est arrivé ».
Ce déplacement est souvent le début d’une véritable guérison intérieure.
Il ne s’agit plus de savoir si c’est vrai… mais de se libérer de l’emprise du souvenir, de retrouver sa liberté psychique, de reprendre la main sur son propre récit de vie.
Il accompagne le patient dans l’exploration des couches mémorielles, affectives et symboliques de son histoire, en lui offrant un cadre stable, une présence soutenante et une parole qui ne colonise pas son expérience, mais la fait résonner.
Il sait que dans l’inconscient, le souvenir est moins une preuve qu’un poème, un morceau de vérité subjective à déchiffrer ensemble, pas à imposer.
En psychothérapie comme en psychanalyse, il ne s’agit donc pas de traquer le vrai, mais d’accueillir le vécu du patient avec finesse, prudence et ouverture.
La mémoire est un tissu fragile, tissé de perceptions, d’oublis, de fantasmes et d’émotions. Elle se reconstruit à chaque instant, au gré de nos liens, de nos blessures et de nos espoirs.
🗣️ « Ce que j’ai cru vivre m’a construit autant que ce que j’ai réellement vécu. »
C’est pourquoi le psychologue ou le psychothérapeute n’a pas pour mission de trancher entre mensonge et vérité, mais de soutenir le patient dans l’exploration de ce qui fait symptôme, récit, mythe personnel. Et parfois, ce travail suffit à libérer, sans qu’il soit besoin de savoir.
Le cerveau est une fabrique d’histoires : il comble parfois les trous de mémoire avec des images ou récits crédibles, mais inexacts. Ces souvenirs peuvent surgir à partir d’un rêve, d’un récit entendu ou d’une émotion forte. En thérapie, on ne cherche pas à juger leur véracité, mais à comprendre ce qu’ils révèlent de vous, de vos ressentis, et de votre histoire intérieure.
Mais en thérapie, un faux souvenir n’est pas un piège : c’est un message du psychisme. Le danger, ce n’est pas l’erreur, mais l’absence d’élaboration. Être accompagné permet de donner du sens à ce souvenir, sans en faire une vérité absolue, ni le rejeter. Ce travail permet souvent d’apaiser des douleurs profondes.
Il vous aide à explorer ce qu’il signifie, ce qu’il vient exprimer, et comment il s’inscrit dans votre parcours. Il ne cherche pas à savoir si c’est « vrai », mais à comprendre pourquoi cela vous touche, maintenant. Sa posture éthique consiste à vous accompagner dans cette exploration, tout en protégeant votre espace de pensée et votre intégrité psychique.
Les émotions fortes, les silences familiaux ou les événements mal compris peuvent brouiller la mémoire. En thérapie, ces flous ne sont pas des obstacles, mais des points d’entrée : ce qui est confus mérite d’être écouté. Ce n’est pas la précision qui soigne, c’est le lien que vous créez avec ce souvenir.
Mais entre de bonnes mains, ces outils peuvent au contraire aider à retrouver des sensations, des émotions enfouies, sans imposer d’interprétation. Le plus important est de consulter un thérapeute formé, respectueux, et attentif à ne jamais suggérer de scénario. Ce que vous vivez reste à vous. L’hypnose et l’EMDR doivent toujours respecter votre rythme et votre subjectivité.
Ce que vous vous rappelez aujourd’hui peut être différent de ce que vous ressentiez à l’époque. En thérapie, on ne cherche pas une mémoire parfaite, mais une mémoire habitée, vivante, qui vous aide à comprendre ce que vous avez vécu… ou cru vivre.
La mémoire de l’enfance est souvent floue, parcellaire, et influencée par l’imaginaire. Vous pouvez ressentir quelque chose de très fort sans pouvoir dire si cela a vraiment eu lieu. Ce doute n’est pas un problème : il est même parfois le point de départ d’un travail thérapeutique précieux, car ce qui compte, c’est le sens que vous donnez à ce souvenir, pas sa véracité absolue.
Si une scène vous a marqué émotionnellement, elle peut s’infiltrer dans votre mémoire comme si elle vous appartenait. Le cerveau ne distingue pas toujours clairement entre ce qu’il a vu, rêvé ou vécu. En thérapie, on accueille ces images pour ce qu’elles sont : des signaux psychiques, des représentations symboliques, et non forcément des archives fidèles de votre passé.
Ce qui vous aide à avancer, c’est de mettre en mots ce que vous ressentez, de comprendre ce que le souvenir évoque, de faire du lien entre vos émotions et votre histoire. Même un souvenir incertain peut libérer une parole, ouvrir une prise de conscience, ou apaiser une souffrance. En thérapie, ce n’est pas le vrai ou le faux qui compte, mais le travail de sens et de transformation.
Ce surgissement peut surprendre, troubler, ou bouleverser. Il ne s’agit pas forcément d’une "révélation", mais souvent d’une mise en forme d’un ressenti ancien qui demande à être entendu, compris et intégré.
Elle peut rester enfouie, revenir en flashs, ou s’exprimer par des symptômes. Certains récits émergent comme des tentatives de mettre en scène une douleur ancienne, même sans preuve concrète. Cela ne veut pas dire que tout est vrai ou faux, mais que le vécu mérite d’être écouté avec délicatesse, sans précipitation ni jugement.
On parle parfois de refoulement : le souvenir a été mis à distance pour protéger la psyché. Avec le temps, ou dans un cadre thérapeutique contenant, il peut remonter, sous forme d’images, de rêves ou de sensations. Ce retour peut être déstabilisant, mais aussi libérateur, s’il est bien accompagné.
Avant de le partager, il est important de le comprendre, l’intégrer, et l’élaborer, souvent avec l’aide d’un thérapeute. Parler trop tôt, sans avoir fait ce chemin intérieur, peut parfois créer des tensions ou des malentendus. Il est légitime de garder certaines choses pour soi, ou d’attendre le bon moment, si jamais il se présente.
Vous avez le droit de douter, de questionner, de ne pas tout savoir. Un souvenir n’a pas besoin d’être "vérifié" pour être digne d’attention. Ce qui importe, c’est ce que vous ressentez à son sujet, et ce qu’il vient toucher en vous. En thérapie, l’enjeu n’est pas de faire la lumière à tout prix, mais de vous aider à y voir plus clair en vous-même, en sécurité.
Un bon thérapeute vous accompagne sans trancher. Il ne vous impose pas sa lecture, ne cherche pas à prouver ou à invalider. Il vous aide à explorer ce que vous vivez, ce que ce souvenir veut dire, ce qu’il vient réparer ou exprimer. Sa neutralité bienveillante est là pour vous permettre de penser librement, sans pression.