
La séparation parentale bouleverse toujours l’enfant, non seulement dans son quotidien, mais dans son espace psychique intime : comment rester “un” quand le monde des adultes se divise ? La garde alternée n’est pas qu’une organisation pratique : elle devient un terrain où se jouent loyautés invisibles, continuité affective et place du tiers. À Versailles, j’accompagne de nombreux parents et enfants dans ce passage délicat, en psychothérapie analytique et intégrative. Ici, il ne s’agit pas d’optimiser un planning, mais de soutenir l’enfant dans son droit à exister, sans porter le poids de la séparation..
Cabinet de psychothérapie, approche analytique & intégrative Versailles, Yvelines
Maya, 10 ans, portait un sérieux qu’aucun enfant ne devrait connaître. Elle souriait pour rassurer son père, restait sage pour soulager sa mère. Entre les deux maisons, elle ne transportait pas des affaires : elle transportait la dette invisible de faire tenir l’histoire familiale.
Dans ses mots, il n’y avait aucune plainte. Dans son corps, en revanche, une tension permanente. Elle avait “compris” trop tôt qu’être neutre, c’était survivre. Sa loyauté était une survie affective, inscrite au-delà du présent, dans les héritages silencieux de générations où l’enfant devenait soutien émotionnel.
Le travail thérapeutique ici consistait à défaire cette dette qui n’était pas la sienne, à lui offrir un espace où elle ne devait pas réparer, mais simplement être. Parce qu’aucun enfant ne devrait devenir gardien des fragilités parentales.
La garde alternée n’est pas qu’un agencement pratique ; c’est un passage psychique où l’enfant apprend à rester un, là où le monde parental s’est séparé. Elle peut offrir un espace serein lorsque le lien entre les adultes demeure habitable, quand la parole circule et que l’enfant n’est pas chargé de réparer ce qui s’est défait.
Mais lorsque les tensions persistent, même sous le vernis de la bonne volonté, l’enfant peut se retrouver pris dans des loyautés invisibles : rassurer, choisir sans le dire, ne pas trop aimer l’un pour ne pas blesser l’autre. Ce n’est pas la séparation qui blesse, mais la place qu’il doit prendre lorsqu’on le confond avec un pont, un juge ou un témoin.
Ce travail de réaménagement, parfois accompagné en thérapie, vise à lui permettre de se sentir autorisé à exister entre, sans avoir à se diviser. Grandir, ici, consiste à pouvoir circuler librement sans craindre de trahir.
Vous faites déjà du mieux possible — et ça compte énormément.
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Bien que ces répercussions varient d'une famille à l'autre, elles sont souvent profondes et persistent bien au-delà des premiers mois de la rupture. Examinons comment la séparation crée des tensions durables entre les parents et les enfants, les mécanismes en jeu et les moyens d'atténuer ces effets pour préserver un lien familial sain.
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Dans une famille, même séparée, un enfant ne se construit pas simplement entre deux adultes : il se construit dans l’espace symbolique qui existe entre eux. Cet espace, lorsqu’il est vivant, joue le rôle de tiers : il permet à l’enfant de ne pas être pris dans un face-à-face, de ne pas devoir choisir, s’ajuster, réparer ou arbitrer. Quand ce tiers est abîmé, effacé, ou chargé d’amertume, l’enfant n’est plus « entre » deux parents : il glisse dans l’entre-deux, un lieu instable où il devient trop sensible aux mouvements des adultes. Ce n’est alors plus seulement une séparation conjugale : c’est une défaillance de la fonction tierce, ce repère symbolique qui autorise l’enfant à être sujet, et non témoin silencieux ou preuve vivante qu’on a bien agi.
Du point de vue clinique, on retrouve tous les signes d’une lutte pour préserver une continuité d’être (Winnicott) tout en tentant de ne pas se dédoubler intérieurement. Ce n’est pas la garde alternée qui fragilise, mais l’absence d’un cadre où l'enfant sait : « Je peux être moi, ici comme là-bas, sans perdre l’un si je me tourne vers l’autre. »
Lorsque ce point d’ancrage symbolique se maintient, l’enfant circule ; il n’est pas balancé. Il se sépare sans se fracturer.
Lorsque ce point vacille, il tente parfois de l'incarner lui-même — et aucun enfant ne devrait porter cette charge.
Le travail thérapeutique, qu'il soit analytique, systémique ou intégratif, ne vise alors pas à « choisir un bon parent » ni à « optimiser un planning », mais à restaurer un espace psychique stable, un tiers vivant : une place où la parole circule, où l’enfant n’a pas à garantir la paix, où sa subjectivité trouve un sol pour s’enraciner.
Autrement dit, il ne s’agit pas d’organiser deux maisons, mais de préserver une seule intériorité, un dedans qui reste habitable — parce que l’enfant n’est pas appelé à maintenir la famille, mais à se constituer comme sujet.
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Recevoir un enfant en garde alternée, ce n’est pas “gérer une séparation”. C’est rencontrer un sujet qui cherche à garder un lieu intérieur intact, alors que son monde extérieur s’est divisé. En séance, l’enfant n’a pas à expliquer, à choisir ni à protéger. Il peut éprouver, déposer, jouer, parfois se taire — sans qu’aucun regard ne lui demande implicitement d’être juste, loyal, solide, ou arrangeant. La thérapie devient cet espace où il peut se retrouver entier, sans avoir à se partager.
Le rôle du clinicien — qu’il soit d’orientation analytique, systémique, humaniste ou intégrative — n’est pas de prendre parti, ni d’ajuster des calendriers, mais de soutenir la continuité du sujet. Cela peut passer par la parole, par le jeu, par le dessin, par des médiations symboliques, ou parfois par des approches complémentaires (TCC, médiation familiale, travail corporel, EMDR lorsque le vécu traumatique se cristallise).
Ce cadre permet à l’enfant de faire l’expérience fondatrice suivante :
Je peux exister sans porter. Je peux sentir sans devoir réparer. Je peux être un, même quand le monde autour de moi se réorganise.
Pour certains, il s’agit de retrouver une sécurité affective de base — ce holding qui n'est pas seulement une présence, mais une capacité à contenir leur monde intérieur.
Pour d’autres, le travail touche la question de la place : ne plus être le messager, l’arbitre, le consolateur, ni la preuve vivante que tout va bien.
Dans ces espaces thérapeutiques, la parole redevient possible, mais aussi le silence ; l’affect retrouve sa liberté sans se confondre avec la loyauté ; et l’enfant découvre qu’il existe un lieu où il ne choisit pas, il devient.
Parce qu’au fond, accompagner un enfant en garde alternée, c’est veiller à ce que la séparation des adultes n’ouvre pas une division psychique chez lui. C’est lui permettre de ne pas confondre adaptation et disparition, loyauté et renoncement à soi.
Il y a, dans chaque famille, des fils invisibles que les enfants sentent avant même de les comprendre. Boszormenyi-Nagy les appelait loyautés invisibles : ces fidélités silencieuses qui lient l’enfant à son origine, à ses parents, mais aussi à ce qui les précède — leurs blessures, leurs rêves, leurs dettes affectives. Dans le contexte d’une séparation, ces loyautés deviennent parfois plus lourdes. Non parce que l’enfant manque d’amour, mais parce qu’il en a trop — ou plutôt, parce qu’il ne veut en trahir aucun. Alors, il se tient droit, il écoute, il “comprend”, il s’ajuste. Parfois même il ne dit rien, mais son corps parle pour lui.
Dans certaines familles, lorsqu’un parent souffre davantage, l’enfant peut s’aligner intérieurement du côté de la fragilité, comme s’il devait veiller à ne pas abandonner celui qui semble déjà laissé. Dans d'autres, il peut se tourner vers le parent fort, pour ne pas être associé à la chute. Ce n’est pas un choix. C’est un héritage.
Ce mouvement n’est pas conscient ; il relève de ce tissu profond où l’enfant garde la trace de ceux dont il vient. Il ne supporte pas simplement deux rythmes, deux maisons : il supporte parfois deux histoires, deux douleurs, deux narcissismes blessés. Il tente d’équilibrer ce qu’il n’a pas détruit, et ce n’est jamais à lui d’en porter le prix.
C’est là que la clinique gagne en profondeur. Le travail n’est pas seulement d’apaiser l’angoisse ou les symptômes, mais de rendre à l’enfant sa juste place dans la filiation. De lui rappeler, dans l’espace thérapeutique, qu’il ne vient pas réparer : il vient hériter d’un monde et y déployer le sien. Cela demande de reconnaître que certaines souffrances ne lui appartiennent pas, que certaines dettes ne sont pas les siennes, et qu’aucun amour d’enfant ne peut compenser la faille entre deux adultes.
Le geste thérapeutique, alors, n’est pas seulement de sécuriser ; il est de dissoudre le mandat invisible, de permettre à l’enfant de se détacher de cette fidélité silencieuse qui l’empêche de devenir sujet. C’est redonner au parent sa responsabilité d’adulte et à l’enfant le droit fondamental de n’être ni tuteur émotionnel, ni caution affective, ni témoin sacrifié.
Ce travail — qu’il soit mené en psychothérapie analytique, systémique, humaniste ou intégrative — protège l’enfant d’un piège subtil : celui de confondre être aimé et être utile au maintien de l’autre.
Parce qu’une séparation qui respecte l’enfant ne le transforme pas en héritier d’un conflit, mais en héritier d’un lien vivant, même transformé. Et ce n’est qu’alors qu’il peut, vraiment, se construire.
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Lorsque l’on devient parent, on n’imagine pas devoir apprendre à aimer sous deux toits. On rêve d’un même foyer, d’une continuité simple. Et puis la vie parfois prend une autre forme, et il faut réinventer la famille.
La garde alternée peut être une solution juste, mais elle demande du temps, de la délicatesse et une grande attention aux besoins émotionnels de l’enfant. Il ne s’agit pas seulement d’organiser des journées : il s’agit de préserver un cœur, une unité intérieure, un fil qui relie.
Beaucoup de parents qui consultent au cabinet — à Versailles et dans les Yvelines — ne viennent pas “parce que ça va mal”, mais parce qu’ils sentent qu’il se passe quelque chose chez leur enfant, quelque chose de subtil, de difficile à nommer. Un changement d’humeur, une fatigue émotionnelle, une inquiétude le dimanche soir, un silence inhabituel. Parfois, ce n’est pas l’enfant qui souffre le plus, mais le parent qui ne veut pas transmettre sa propre peine. Et c’est déjà un geste d’amour immense.
L’accompagnement thérapeutique permet alors d’offrir un espace neutre, sécurisant, où chacun peut respirer sans avoir à protéger l’autre.
On y travaille la continuité du lien, le droit pour l’enfant de se sentir chez lui partout — mais surtout en lui-même.
On y soutient aussi les parents : leur capacité à coopérer malgré les émotions, à rester deux adultes qui se parlent à propos d’un enfant qui n’a pas à choisir.
Chaque famille invente sa manière.
Je vous reçois à Versailles avec un soin particulier porté à cette dimension :
celle de l’enfant qui doit pouvoir grandir sans porter le monde des grands sur ses épaules.
Parce qu’un enfant n’a pas besoin d’une famille parfaite pour se construire —
il a besoin d’adultes qui veillent à ne pas mettre leurs fractures dans son chemin.
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Un changement de comportement, une irritabilité soudaine, un trouble du sommeil ou un repli peuvent être des symptômes psychiques d’un malaise. Cela ne signifie pas que la garde alternée est mauvaise en soi, mais qu’un ajustement ou une écoute plus fine est nécessaire. Un psychologue ou un psychothérapeute peut aider à comprendre ce qui se joue, avec un regard psychologique qui soutient l’enfant sans le culpabiliser. L'idée n’est pas de chercher une faille parentale, mais d’entendre ce que l’enfant n’arrive pas encore à dire.
La thérapie n’est pas un verdict, c’est une possibilité. Parfois, quelques séances suffisent pour offrir un espace neutre et sécurisant. Entamer une thérapie permet à l’enfant d'avoir un lieu où il n’a pas à protéger l’un ou l’autre parent. Si un travail s’engage, il peut être analytique, systémique, ou inspiré de démarches comme la Gestalt, l’analyse transactionnelle, ou des approches plus comportementales. Un cadre thérapeutique clair garantit la déontologie et le respect du rythme de l'enfant.
Parfois, l'enfant a simplement besoin d’être rassuré, d’avoir des repères stables ou un temps pour déposer ce qu’il vit. Avant de modifier l’organisation, certains parents choisissent de faire une psychothérapie familiale ou d’engager un accompagnement avec un praticien formé aux psychothérapies de l’enfant. Cela permet d’entendre ce qui se joue dans le lien, et non seulement dans la logistique. Une décision éclairée se prend souvent dans un cadre de la thérapie, en lien avec un thérapeute.
Certains enfants trouvent un appui dans une approche analytique, d’autres dans des interventions plus relationnelles, intégratives, ou encore Ericksoniennes lorsque l'imaginaire les aide à se consolider. Les psychiatres, psychologues, psychothérapeutes et praticiens en psychothérapies sont tous susceptibles d'accompagner, selon leur formation et leur déontologie. L’essentiel est que l’enfant se sente reconnu comme sujet, pas “soigné” comme un problème.
Certains parents expérimentent d’abord une écoute différente : ralentir, ritualiser les transitions, soutenir le jeu, nommer les émotions. Mais lorsque l’enfant devient le régulateur du parent — ou lorsque le parent doute de ses repères — entreprendre une thérapie peut être un cadeau, pas une sanction. Un thérapeute ou psychothérapeute vient soutenir ce lien. “Faire une thérapie”, dans ce contexte, c’est offrir un espace tiers, pas déléguer la parentalité.
Consulter ne signifie pas “il y a un problème”, mais “nous ne voulons pas laisser le mal-être s’installer”. Certains parents choisissent de suivre une thérapie eux-mêmes, car le travail se joue aussi du côté des adultes. Un psychiatre, un psychologue, un psychothérapeute, ou un praticien en approche psychothérapeutique peut accompagner avec respect et douceur.
Parfois, faire une thérapie sert à ne pas transmettre ses blessures. D’autres fois, cela permet de guérir une douleur ancienne révélée par la séparation. La thérapie n’est pas “réparer l’enfant” mais lui offrir un lieu qui n'est pas pris dans le conflit. On n’entre pas en thérapie pour être “meilleur parent”, mais pour laisser une place juste à chacun. C’est un geste d’amour, pas un diagnostic de défaut.
Tout dépend du climat relationnel et du respect du rythme du sujet en devenir. Les difficultés ne viennent pas de la garde en elle-même, mais de ce que la séparation réactive chez les adultes. C’est cela que la psychopathologie familiale observe. Là où le conflit persiste, la thérapie vient créer de l'espace ; là où la parole circule, l'enfant trouve sa place.
Entamer une thérapie en tant que parent peut suffire à changer l’ensemble de la dynamique familiale. Lorsqu’un adulte travaille sur son rapport à la séparation, à la perte, à la culpabilité ou à la colère, quelque chose se détend autour de l’enfant. Ce dernier n’a plus à surveiller, rassurer, équilibrer ou consoler. Il retrouve sa position d’enfant — un espace où il peut se développer, pas se mobiliser psychiquement pour maintenir les adultes debout.
Dans la clinique, il n’est pas rare qu’un seul parent en psychothérapie — qu’elle soit analytique, relationnelle, Gestalt, comportementale ou Ericksonienne — suffise à apaiser l’environnement. Ce travail peut se faire avec un psychologue, un psychothérapeute, un psychiatre, ou un praticien en psychothérapies intégratives, selon son histoire, son rythme et son besoin. L’essentiel est que le cadre thérapeutique permette de déposer ce qui sinon se dépose sur l’enfant.
Ce geste ne signifie pas “je suis fautif” mais “je prends soin du lien”. Cela protège l’enfant de la tentation de devenir un soutien affectif, un confident ou un petit médiateur. Et lorsque l’adulte n’a plus besoin de l’enfant pour tenir le fil de sa vie intérieure, l’enfant peut enfin respirer, jouer, s’autoriser à grandir — sans porter ce qu’il n’a pas choisi.
Faire ce pas n’est pas une preuve de faiblesse, mais une marque de responsabilité et d’amour. Parfois, c’est le parent qui commence la thérapie qui montre silencieusement à l’enfant la plus belle leçon de vie : on n’a pas à guérir seul.
“Faire une thérapie” ou suivre une thérapie n’est pas une marque d’échec, mais un acte de responsabilité. Un parent soutenu devient un parent contenant. Vous n'êtes pas obligé de porter seul. La psychologie, quand elle se déploie dans un cadre de la thérapie éthique et humain, sert la famille entière — pas seulement l’enfant.